11 mai 2020 : vie d’avant ou vie d’après ?

Aucune des deux mon Capitaine, nous sommes actuellement dans la vie pendant ! Tout devrait aller pour le mieux, la sortie de confinement (le déconfinement sera pour un peu plus tard) se profile pour le 11 mai… Enfin si tout va bien, si notre département est vert et pas rouge, si on est un adulte qui travaille ou un enfant en primaire, si on ne travaille pas dans café/bar/restaurant, si on ne se déplace pas dans un rayon de plus de 100km, bref avec des “si”… Edouard Philippe a annoncé depuis moins d’une semaine les conditions de cette première étape et déjà on peut constater soit des esprits qui se réjouissent, soit d’autres qui s’inquiètent et le font fortement savoir. Autant le dire tout de suite la vie pendant, c’est la pire à gérer…

Je vais faire un parallèle, peut être malheureux, mais la période que nous vivons me parait finalement assez proche à ce que peut vivre un être humain lorsqu’il est confronté à une maladie de longue durée. J’ai la “chance” d’accompagner des femmes touchées par un cancer dans le cadre de leur Retour à l’Emploi (cf la page Engagement Personnel de ce site). Je parle bien de “chance” car il s’agit aussi pour moi de faire le plein de compétences de Vie, de Survie chez ces femmes qui pourraient être inspirantes pour bon nombre d’entre nous. Ne vous méprenez pas, je ne cherche pas à idéaliser le cancer qui serait banalisé comme une expérience de vie permettant de cheminer vers la résilience et en sortir grandi. Non, le cancer c’est une belle saloperie qui broie des vies, des familles au sens propre comme au sens figuré…

Aujourd’hui, 50% des personnes traitées guérissent et peuvent espérer reprendre le cours de leur vie professionnelle. Reste que ce chemin est semé d’embûches (30% des personnes touchées par un cancer perdent leur job dans les 2 années qui suivent le diagnostic) et que le cours de la vie a pris un sacré coup derrière l’oreille. C’est dans ce cadre que je trouve ce fameux parallèle.

Il y a la vie d’avant : agréable ou délicate à vivre, peu importe, mais c’était un point de repère essentiel pour chacun d’entre nous pour tout ce que nous connaissions jusque-là. Nos jobs, les restaurants avec les amis, les sorties au cinéma et les ballades familiales que nous pouvions faire tranquillement sans nous soucier de quoi que ce soit. Puis vient le moment terrible et effrayant du diagnostic ou pour ce qui nous concerne la découverte des ravages qu’a pu faire ce virus. Cette étape a été concomitante avec la mise en place du confinement. On constate généralement des comportements qui correspondent également aux étapes de Choc et de Déni identifiées par Elizabeth Kübler-Ross dans ses travaux sur le Deuil. Ceci était assez flagrant le week-end du 15 mars avec des individus qui fêtaient la fermeture des restaurants le samedi soir, se regroupaient dans les parcs le dimanche après-midi pour profiter de la météo printanière. Les organisations étaient également bousculées en maintenant par exemple le 1er tour des élections municipales. J’étais moi-même assesseur dans un bureau de vote ce dimanche-là, donc pas meilleur que les autres.

Et enfin, il y a la vie d’après : la guérison ! Voilà le moment tant espéré et attendu par une personne touchée par une longue maladie. Le moment où la personne peut débuter la vie d’après. Celle-ci est forcément différente car il y a des séquelles physiques tout d’abord. Les stigmates des cicatrices opératoires ou la fatigue liée aux traitements restent présents pour rappeler quotidiennement à la personne qu’elle a été touchée par une maladie grave au cas où celle-ci aurait l’intention de vouloir l’oublier un tant soit peu… Il y a également les séquelles psychologiques qui font que la personnes ne peut reprendre le cours de sa vie d’avant soit du fait des contraintes précédemment citées, soit par choix volontaire de donner plus ou moins fortement une nouvelle direction à sa vie. C’est la dernière phase qui correspond à l’ultime étape de Développement dans les travaux d’Elizabeth Kübler-Ross et qui correspondra pour nous au jour où un vaccin sera identifié, produit et inoculé en masse pour que nous puissions démarrer la vie d’après.

Et la vie pendant, alors ? La vie pendant, je ne vais pas y aller par 4 chemins, c’est le bordel ! La vie pendant pour une maladie longue durée, c’est tout d’abord se retrouver confronté à une dure réalité : nous sommes mortels. Ça parait évident de le dire mais quand on y est confronté, ce n’est pas la même chose que de le vivre. Cette perception nouvelle de la mort implique en conséquence un rapport nouveau à la vie. Les pensées morbides, aussi naturelles soit elles, expliquent les excès de panique et la difficulté à détacher notre regard vers la mort. C’est aussi pourquoi les chaines d’infos continue ainsi que les interventions quotidiennes de Jérôme Salomon sont autant suivies tout comme une personne touchée par le cancer ne parvient pas à chasser de sa tête l’éventualité de sa propre mort.

Ensuite, viennent les traitements et les effets de ceux-ci. J’en ai déjà parlé pour les gens touchés par une maladie de longue durée mais pour notre société, quels sont ils ? Le confinement va déboucher sur une crise économique, c’est un secret de polichinelle : licenciements, fermeture d’usines et de commerce… D’autres désastres d’ordre social sont également en cours de manière plus silencieuse : violence conjugale et familiale, autres malades qui ne vont pas se soigner, dépression et dépendances se révéleront à leur tour au grand jour.

Nous arrivons à un moment où le traitement va prendre fin et avec lui toutes les angoisses de rechute. Le 11 mai si tout va bien, nous ne serons qu’en rémission finalement avec au-dessus de notre tête cette épée de Damoclès que pourrait être la 2ème vague de l’épidémie. C’est parfois une période très compliquée à vivre pour les personnes touchées par un cancer car cela correspond à la fin d’une période où ils se laissent guider à juste titre par les médecins et du jour au lendemain la routine et l’énergie nécessaire pour supporter les traitements ne sont plus là. Le combat s’arrête et l’énergie nécessaire jusque-là commence à manquer. C’est aussi le moment où les questions de vie, de survie, de choix de vie viennent naturellement à l’esprit des personnes et ce, de manière très consciente ou complètement inconsciente.

Il y a 3 pensées principales qui apparaissent à ce stade, sans qu’aucune chronologie ne les hiérarchise. Il y en a certainement d’autres et surtout, il faut être conscient qu’il ne s’agit pas là de pensées uniques mais d’une réflexion qui évolue (ou pas) dans le temps et j’observe parfois un mix entre ces 3 pensées : 

  • Je veux retrouver ma vie d’avant
  • Je ne parviens pas à tourner la page
  • Je veux aller de l’avant

Avec “je veux retrouver ma vie d’avant”, la personne fournit des efforts titanesques pour retrouver sa vie d’avant et considère sincèrement que la maladie ne l’a pas changée malgré les séquelles. “Je n’ai pas réussi à tourner la page” implique que la personne souhaite tourner cette page mais qu’il y a un constat d’échec face à cette volonté à cet instant T. “Je veux aller de l’avant” traduit la volonté de profiter de cet “épisode de la vie” pour effectuer une métamorphose, une forme de renaissance. Vous pouvez maintenant mieux cerner le parallèle dont je parlais au début de cet article.

Dans la crise actuelle, nous avons d’un côté, les défenseurs du monde de demain : prise en conscience écologiste, rapport nouveau à la place du travail dans la vie, commerce équitable et durable… De l’autre ceux qui espèrent que rien ne changera, que tout redeviendra comme avant et que nos vies resteront inchangées. Au milieu ceux qui voudraient bien aller de l’avant, communiquent sur des changements à venir mais dont les logiciels pour l’instant ne permettent pas de faire cette mise à jour et migrer vers cette version 4.6 intéressante mais un peu encore effrayante.

Dans les entreprises, nous pouvons trouver aujourd’hui certains responsables qui se prononcent clairement pour le retour le plus rapide de tous leurs collaborateurs dans les bureaux faisant fi des recommandations sanitaires pour s’assurer le plus rapidement possible d’un rattrapage du chiffre d’affaires perdu, d’une rentabilité en berne. Pression issue des actionnaires qui espèrent que les KPI’s se rétablissent ASAP. Une amie me faisait part hier soir au téléphone de la pression que subissait sa fille pour retourner dans les bureaux de son entreprise à La Défense dès le 11 mai alors qu’elle venait de toucher une prime pour reconnaitre sa réactivité et son implication pendant cette période de télétravail forcé. L’illusion de la vie d’avant est parfois tenace mais va se crasher face à la réalité du 11 mai : port du masque, distanciation spatiale entre collaborateurs, gestes barrières qui vont nous empêcher de nous faire la bise, se serrer la main, d’avoir un contact humain… Vous trouvez vraiment que ça ressemble à la vie d’avant ? Les séquelles vont être très visibles et pour un certain temps encore.

A l’autre bout de la chaine, nous avons des collaborateurs qui ont réussi à faire cohabiter leurs vies personnelles avec leurs vies professionnelles et sont en quelque sorte devenus des auto-entrepreneurs au sein de leurs entreprises : adaptation, autonomie nouvelle que l’éloignement du management n’a pas eu tendance à étouffer. Ils aspirent aujourd’hui à une nécessaire adaptation de leurs conditions de travail. D’autres moins visibles jusqu’ici tels les ouvriers des chaines de production, les caissières des supermarchés, le personnel soignant ont bénéficié d’une sincère reconnaissance et espèrent légitimement que celle-ci perdurera dans la vie d’après. On trouve également beaucoup de remise en cause de l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle, comme si ce confinement avait permis à certains collaborateurs de découvrir qu’il y a une vie en dehors du travail et que finalement, nous n’en avons qu’une seule… 

Je tiens tout de suite à rassurer les managers et autres dirigeants d’entreprise, dans le cadre des accompagnements que j’ai réalisé, je n’ai pas encore connu de personnes qui change radicalement de vie en abandonnant par exemple une carrière de cadre dirigeant pour aller élever des chèvres dans le Larzac. Le changement identitaire est profond mais il s’exprime assez souvent dans un contexte professionnel assez proche de celui de la vie d’avant. En entreprise, il peut être espéré des évolutions d’organisation sans que cela pousse à un chamboule-tout général de l’entreprise.

Toutes les organisations font aujourd’hui face à ces interrogations : Etats, Organisations supra-nationale comme l’UE, Entreprises, Administrations, Associations, Familles et bien évidemment nous tous en tant qu’individus. Il est logique et normal qu’aujourd’hui tout le monde se sente pris au dépourvu et ne parvienne pas encore à se positionner clairement. Une rupture de vie (comme celle liée à une maladie longue durée ou un accident grave) ne se gère pas du jour au lendemain. Alors, comment faire pour vivre cette vie du pendant ? Honnêtement, je ne suis pas le mieux placer pour répondre à cette question et si je me fie aux expériences d’accompagnement avec des Ladies Roses (c’est comme cela qu’on appelle les adhérentes à La Maison Rose à Bordeaux), je peux affirmer qu’il n’y pas de réponse définitive et exclusive à cette question (ou du moins si quelqu’un en a une, qu’il me fasse un signe). Elles seraient les plus à même d’y répondre car in fine, ce sont bien elles qui parviennent à effectuer ce cheminement. Le rôle d’un coach n’est que d’accompagner une personne en gardant à l’esprit que la personne est plus experte d’elle-même que n’importe qui. Je garde aussi à l’esprit que les personnes qui traversent une maladie de longue durée, développent sans s’en rendre compte des capacités et compétences dont elles n’ont souvent pas conscience pour “sur-vivre”.

Pour autant je peux identifier plusieurs points communs pour celles qui parviennent à effectuer plus facilement ce passage de la vie d’avant à la vie d’après :

  • Prise de conscience que la vie ne pourra plus jamais être celle d’avant
  • Identification des valeurs et des actions qui ont été utiles durant la période des traitements
  • Mise en évidence des expériences de la vie d’avant qui ont permis à la personne de dépasser une difficulté (aussi simple fut-elle)
  • Définition d’un Projet de vie et d’une Ambition pour la vie d’après

Le parallèle est donc pour nous d’appréhender ces quelques points de réflexion (il y en a certainement d’autres) pour faire face à la vie pendant que nous connaissons actuellement. Si ce travail peut être effectué à titre individuel, il peut bien évidemment être fait à titre collectif. Les responsables d’organisations pourraient donc avoir ces idées en tête pour aborder la reprise de l’activité. Certes, la crise est déjà présente, elle va être dure et nous avons tous les compétences de vie et de survie en nous pour la dépasser. Par contre, il est certain que si on se laisse embarqué par cette crise en ayant la volonté de l’affronter avec les logiciels de la vie d’avant, j’ai bien peur que ce soit bien plus compliqué. L’enjeu pour les responsables est de se poser, écouter sincèrement les équipes quant à leurs attentes, espoirs… Qu’est ce que cette crise a généré de nouveau qui pourrait s’adapter au contexte de l’entreprise ? La réactivité des collaborateurs pour gérer leurs vie pro et perso sont autant d’atouts pour les organisations pour réussir la vie pendant et arriver à gérer la vie d’après. Il serait dommage de ne pas exploiter cette richesse…

Conversation imaginaire avec Covid 19

Cette conversation est grandement inspirée d’une interview de Bernard Pivot (“C dans l’Air” sur France 5) au cours de laquelle il personnalisait le Covid (qu’il appelle Crocovid) en nommant certaines de ses forces et faiblesses. J’en ai repris certaines, en ai développé d’autres à la manière d’un Coaching Narratif. Et quand un Praticien Narratif rencontre un problème, voici le type de conversation qu’il peut avoir avec lui…

Bonjour Covid, je suis ravi de te rencontrer. L’objet de cette conversation est pour nous de te connaitre d’avantage. Peux tu me dire d’où tu viens ?

Bonjour. Merci de me donner enfin la parole parce que jusque là je n’ai pas eu trop l’occasion de m’exprimer. Je peux pas trop te dire d’où je viens, je tiens à cultiver une certaine discrétion. Disons pour faire simple que je viens d’Asie.

Ok. Tu dis que tu cultives une certaine discrétion et à côté de ça, on entend parler de toi à longueur de journée. J’ai déjà connu beaucoup plus doué que toi dans la discrétion…

Maintenant c’est différent, j’ai atteint le statut de Rock Star interplanétaire. Je pourrais paraphraser John Lennon, mais finalement on a beaucoup plus parlé de moi pendant Pâques que de Jésus Christ… J’ai réussi le coup parfait !

Mais c’est quoi au juste ton métier ?

Serial Killer Professionnel !

Effectivement, je dois malheureusement te reconnaitre un talent certain… Et pour être honnête, je suis pas hyper à l’aise face à un tueur en série professionnel. Je risque quelque chose ?

Tu t’inquiéterais si tu rencontrais James Bond ? Pourtant, il est 007… Mon nom est Covid, Covid 19. Pour répondre à ta question, toi ça devrait aller : 48 ans, du surpoids certes mais tu n’es pas ma cible préférée. Enfin, fais gaffe quand même…

Et justement, quelle est ta cible préférée ?

Les plus faibles ! Les personnes âgées, les personnes touchées par diverses pathologies. Je suis fondamentalement misandre et je rend misanthrope. Je préfère m’attaquer principalement aux hommes et tente de préserver les femmes. Surtout, je pousse les êtres humains à se refermer sur eux. J’essaye d’être le plus efficace et rapide, c’est pour ça que je m’attaque aux plus faibles.

Mais tout ça dans quel but ?

Mon dessein est profondément Anticapitaliste ! Ma plus grande fierté est d’avoir réussi à mettre l’économie mondiale à l’arrêt depuis 1 mois alors que je suis invisible. Bon je suis sincèrement désolé pour les personnes affectées et celles qui ne s’en sont pas remises.

Covid 19, ça sous entend qu’il y en a eu d’autres avant toi ?

Ben oui, mais ils n’ont pas vraiment réussi, ça n’était pas le bon moment et leur staff n’était pas à la hauteur à l’époque…

Ton staff justement, je me doute bien que tu ne vas pas balancer tous tes complices mais est ce que tu pourrais m’expliquer quelles sont leurs compétences singulières que les staffs de tes prédécesseurs n’avaient pas ?

Il y en a 3 principalement : Libre-Echangisme, Secret Défense et Ça n’arrive qu’aux autres.

Pour Libre-Echangisme, ça parait un peu paradoxal avec ton dessein Anticapitaliste ?

Mieux que ça, c’est du génie et de l’ironie à l’état pur ! C’est d’ailleurs là que mes prédécesseurs notamment avaient échoué. Ils n’avaient pas réussi à sortir de leur région d’origine. Moi, j’ai pu bénéficier des vols low costs, d’usines délocalisées pour infiltrer tous les pays et continents. Et d’ailleurs, ça va de pair avec ce que l’un d’entre vous a qualifié comme étant la croyance d’une Croissance Infinie… Pour Secret Défense, c’était plus un gros coup de pouce du destin. Je remercie les autorités de certains pays qui ont visiblement eu tendance à garder pour elles les ravages que j’étais en train de faire. Tout le monde se serait méfié de moi et je n’aurais pas été aussi tragiquement efficace. Ça n’arrive qu’aux autres lui, je l’avais clairement anticipé. Il était nécessaire que je bénéficie de cette forme de Vanité des autres pays pour que je continue à m’infiltrer. En Europe, pour moi c’était assez rigolo d’observer les pays regarder ce qui se passait en Italie sans prendre la mesure de ce qui allait arriver chez eux. J’étais déjà bien infiltré et déployais mes troupes dans tous les pays. En même temps, il faut reconnaitre qu’ils ne pouvaient que difficilement imaginer ce que j’étais en train de faire. Comme je te l’ai dit au début, j’aime bien cultiver la discrétion.

Et aujourd’hui, comment ça se passe pour toi ?

Malheureusement pour vous, ça se passe encore bien mais les perspectives ne sont pas terribles. Tout d’abord, vous avez coupé d’un coup toute votre économie et ça clairement, je ne l’avais pas anticipé, ce qui me fait atteindre un plafond chez vous. Ensuite, comme tout Serial Killer Professionnel je sais que mes jours sont comptés : vous avez des chercheurs qui vont trouver des traitements pour limiter mes attaques. Ma tête est mise à prix et je sais que d’ici 24 mois un vaccin sera là pour m’exécuter. Ça fait partie des risques du métier, je l’assume mais ça ne m’empêchera pas de continuer à sévir notamment je pense en Afrique même après ma disparition en Europe.

24 mois, ça te laisse quand même pas mal de temps pour sévir…

Ben je n’en suis pas certain… Il y a également d’autres réactions qui me gênent et que je n’avais pas prévu non plus comme la Solidarité. Vous voir rester chez vous pour respecter sagement ce confinement pour éviter que je ne me propage, c’était inimaginable. En Allemagne je veux bien mais en France, Espagne et Italie, je pensais que auriez été plus indisciplinés. Bon fort heureusement, il y a bien quelques relents d’Egoïsme et de Bêtise Humaine par-ci, par-là mais c’est très minoritaire. Le pire c’est tous ces gens qui applaudissent à leurs fenêtres et balcons à 20h, ça, c’est clairement insupportable pour moi. Mais potentiellement, il y a pire pour moi…

Ah bon ? Eclaire-moi parce que là, je vois pas…

Je vais te faire un peu d’histoire : Entre 2007 et 2009, j’avais un Oncle d’Amérique, il s’appelait Subprime. Il a essayé de faire tomber le système et il y est presque parvenu… Lui, il avait fait équipe avec Tout pour ma Gueule et ça avait bien marché notamment en Europe où il n’y avait qu’une Solidarité de façade avec la Grèce… Fort heureusement pour moi, « On fait comme si rien s’était passé » a pris le relais quand Subprime a été supprimé, ce qui m’a permis d’atteindre les résultats que j’ai aujourd’hui.

Et donc ?

Ben imagine que Coopération prenne le dessus et il y a des signes annonciateurs notamment en Europe où ils ont réussi à co-construire à 27 un plan de relance en 72h alors qu’à l’époque de Subprime, ils n’avaient rien accompli de tel en 3 ans, bien au contraire. Imagine maintenant que les pays du monde entier se mettent à coopérer pour chercher des traitements et vaccins, réfléchir à des solutions innovantes et différentes ou pire imaginer un monde différent et là, ça pourrait sonner le glas de la famille Covid… J’espère simplement que « On fait comme si rien s’était passé » prendra le relais…

Maintenant, je vais te poser LA question narrative et je pense que c’est le bon moment… Tu dis que tu es surpris que Solidarité soit arrivée et tu crains même pire pour toi si on arrive à utiliser Coopération, d’après toi qu’est ce que cela dit de Nous ?

Hein ? J’ai rien compris à ta question…

C’est normal, moi-même je l’ai apprise de vieux sorciers et sorcières et pour être honnête, je suis pas sûr de toujours la comprendre… Enfin bref, je voulais simplement savoir ce qui selon toi nous conduit à établir des stratégies qui sont finalement efficaces face à un Tueur en Série Professionnel ?

Ha… Je sais pas… Elle est compliquée cette question…

Je sais, on me le dit à chaque fois… Et sinon, qu’est ce que tu répondrais ?

Heu… Je dirais que vous aimez la Vie…

Donc quand on « aime la Vie », on est plus fort que toi ?

Oui c’est l’évidence ! Mais vous aimez aussi l’Economie et on le voit quand vous réfléchissez au déconfinement… Allez comme tu as l’air sympa et un peu perdu, je vais te faire une confidence…

Je t’écoute attentivement…

Je ne suis pas seul sur le coup et il n’y a pas que la famille Covid à être active. Réchauffement Climatique est également déjà à l’oeuvre et ce depuis pas mal de temps. Lui, c’est l’opposé de moi : je suis invisible et rapide alors que lui est déjà visible mais est hyper lent. On applique pour autant la même stratégie en s’appuyant sur Tout pour ma Gueule, On fait comme si rien s’était passé, Ça n’arrive qu’aux autres et Libre Echangisme… Par contre honnêtement, lui il est beaucoup plus fort que moi.

Je sais, on est déjà au courant et on sait aussi que Coopération guidée par l’Amour de la Vie pourraient nous débarrasser de Réchauffement Climatique… Mais tu parlais d’ironie tout à l’heure, sache qu’il est très possible, grâce à toi, que l’on agisse pour lutter contre « Réchauffement Climatique » quand on en aura finit avec toi. Bon on va s’arrêter là. Je ne te dis pas « Merci, à bientôt » et je ne te fais pas la bise…

Oui, ça me parait plus sûr pour toi…

La Roseraie de Vie

Dans le cadre du Rose Coaching Emploi (Programme collectif de retour à l’emploi pour les femmes touchées par un cancer), j’ai récemment animé un atelier que j’ai intitulé La Roseraie de Vie car il est adapté d’une métaphore appelée l’Arbre de Vie. On m’a suggéré de remplacé l’arbre par un rosier ce qui a plus de sens au sein de la Maison Rose. Il s’agit de dessiner un Rosier avec ses racines, son sol, ses branches, ses feuilles et ses fleurs.

Visuellement, déjà j’ai été bluffé par la délicatesse et la subtilité de tous ces rosiers. Il ne s’agit pas d’un concours de dessin et pourtant les participantes ont toutes fait preuve d’un talent indéniable.

Le but de cette métaphore est de revisiter son parcours professionnels à travers ses expériences, ses valeurs, ses compétences et ses projets d’avenir notamment.

Cela permet surtout d’affiner son projet, de se reconnecter à des compétences et des personnes que l’on a parfois oubliées ou mises de côté. Cela permet également assez fréquemment de se rendre compte qu’un parcours, parfois initialement décrit comme “construit au hasard et au gré des opportunités”, s’est finalement construit autour d’un fil rouge dont nous n’avons pas toujours conscience.

Les contraintes de la vie, tel un déménagement par exemple, nous amène à devoir changer de métier et en trouver un rapidement pour faire face aux besoins financiers. Lorsqu’une personne que j’accompagne me confesse que dans ce type de situation, elle a choisit le premier job qui se présentait à elle, j’ai tendance à sourire et surtout je cherche systématiquement à comprendre ce qui se cache derrière le “hasard”.

Il arrive de prendre un job par précipitation ou besoin mais généralement, l’expérience reste assez courte. A un moment donné apparait le besoin, la nécessité de faire autre chose car sinon d’autres signaux se chargent de dire que ce travail ne correspond pas. Ces signaux sont assez souvent physiques et généralement douloureux.

Insomnies, mal de dos ou encore migraines se manifestent et alors que tous les examens médicaux sont normaux, le corps cherche à dire : “il faut faire autre chose !”. Il est malheureusement fréquent que ces signaux soient ignorés. Je ne cherche pas à dire que toutes les douleurs sont psychosomatiques et il est essentiel de faire tous les examens médicaux nécessaires.

Mais quand les examens sont bons et que les douleurs persistent, “il faut faire autre chose !”. “Oui, mais quoi ?” L’Arbre de Vie et ses déclinaisons sont un bon outil pour revisiter son histoire professionnelle et redécouvrir des pépites. Trouver une activité professionnelle qui ait du sens et pour laquelle on s’éclate est ce à quoi aspire beaucoup de monde et qui est à la portée de chacun.

Il arrive même qu’après avoir revisiter leur parcours, certaines personnes se reconnectent au choix qui les a guidé vers leur métier. L’usure du temps, les réorganisations d’entreprises ou de postes, les nouvelles compétences qu’il faut maitriser alors qu’elle ne nous plaisent pas, les départs de collègues que l’on appréciait, les responsables qui nous inspiraient et qui ont été muté… bref il y a plein de raisons qui font que parfois on oublie les bonnes raisons qui nous ont guidé vers ce métier. Pire encore, parfois on oublie même qu’à un moment donné, on a été fier de l’exercer.

Le Rock’n Roll m’a sauvé !

Ce n’est pas moi mais Bono, le chanteur du groupe U2, qui l’a dit. Je suis effectivement un fan inconditionnel de U2 et le but de cet article est de vous raconter une partie de l’histoire de Bono et les répercussions de celle-ci dans sa vie encore aujourd’hui. Vous restez bien évidemment libre de votre opinion sur la musique du groupe.

Nous sommes en septembre 1974, le jeune Paul Hewson (c’est son vrai nom) a 14 ans. La famille fête les 50 ans de mariage de ses grands-parents maternels. Comme dans toute bonne famille irlandaise, les chants et l’alcool coulent à flot et durant la nuit, malheureusement le grand-père décède d’une crise cardiaque.

Au cours de l’enterrement de son propre père Iris Hewson, la mère de Bono, semble s’évanouir et s’écroule. Elle vient de subir une attaque cérébrale et ne reprendra pas conscience. Elle décède à son tour 4 jours plus tard…

Bono raconte : “Et tout a été fini. C’est comme si notre maison s’était effondrée. Ma mère était morte, et nous n’étions plus que trois à vivre sous le même toit (il a un frère ainé). En fait, ce jour là, ça a cessé d’être un foyer. C’était juste une maison abritant trois hommes qui sombraient lentement, qui ne savaient pas comment gérer cette perte immense et s’entre-déchiraient. Le ton pouvait monter très haut.”

Au cours de l’année scolaire 1976, alors qu’il ne souhaite pas sérieusement y aller, il se se rend à une réunion suite à une annonce déposée dans son lycée : “Batteur cherche musiciens pour fonder un groupe”. Il y a là les 4 qui deviendront U2 et qui commencent à répéter assez lamentablement quelques reprises. A la fin du trimestre, il y avait un “Tremplin Rock” dans le gymnase du lycée et ils se sont mis à répéter 2 titres pour les jouer lors de cet événement.

La suite, Bono la raconte très bien : “On est montés sur cette scène, j’ai gratté ma guitare et quand j’ai entendu cet accord en , ça m’a galvanisé. Quand j’ai entendu cet accord de rebondir contre les murs, j’ai su que j’avais pioché la carte “Sortie de prison”… Ce fut un pur moment de libération. Comme sauter dans la mer et découvrir qu’on sait nager… Tout a changé pour moi, désormais je savais ce que je voulais faire de ma vie. Elle était là, cette chose dont je n’avais pas eu connaissance. Et c’est arrivé tellement vite. D’un seul coup on a une raison d’être. C’est un soulagement si énorme qu’on se dit que ça n’a plus vraiment d’importance si on se fait étendre aux examens.”

Je passe les années pour arriver au 6 décembre 2015. Je suis à l’AccorHotel Arena pour assister à mon 8ème concert de U2. L’ambiance est particulière car il s’agit de l’un des concerts reporté suite aux attentats du 13 novembre. 21h, Bono et ses acolytes arrivent sur scène et les 4 premières chansons s’enchainent. Après avoir fini de jouer “I will follow”, Bono pris la parole comme il lui arrive (trop ?) souvent de le faire pendant un concert :

“Nous avons quelques mots à dire sur les pertes que vous ressentez dans cette ville ce soir. Même si nous pensons connaitre un petit peu sur le Chagrin. J’imagine que le Chagrin est comme une plaie qui ne se referme jamais complètement. Je le ressens encore. J’avais 14 ans quand ma mère m’a quittée mais quand elle m’a quittée, elle a fait de moi un artiste. Et cette plaie est devenue une ouverture vers un autre monde. Et j’ai rencontré ces 3 mecs incroyables (les autres membres du groupe). Ces gars m’ont sauvé. Le Rock’n Roll m’a sauvé. Vous m’avez sauvé. Nous ne pouvons pas vous sauver mais notre prière est de vous être utiles ce soir.”

Au cours de ces 2 années après la mort de sa mère, le jeune Paul s’est beaucoup cherché : la religion et la présence de Dieu, l’alcool certainement, les filles peut-être, la violence évidemment car il se définit lui-même comme étant à l’opposé des chansons qu’il écrit. Tout ceci comme autant d’actes de résistance par rapport à ce qui est, avouons-le, une injustice de la vie.

Puis il a trouvé : Ali tout d’abord son amour d’adolescent qui est toujours son épouse aujourd’hui, les 3 autres membres du groupe qui fait preuve d’une exceptionnelle longévité dans l’histoire du Rock, une stabilité et certainement un sens à sa vie. Paul est devenu Bono Vox (du nom d’un magasin pour malentendants) puis Bono tout court. La “bonne voix” ou la “bonne voie” ? Il s’agit là d’une interprétation personnelle car en latin, on dirait plutôt “Bona Vox” et pour un Irlandais, le jeu de mot n’a pas beaucoup de sens en anglais (“the right voice” et “the right way”). En tout cas, dans mon métier, on évoquerait volontiers une transformation identitaire.

Bono a peu de souvenir de sa mère car après sa mort, son père a complètement cessé de parler d’elle. Ce qui n’est pas raconté, n’existe pas et il est probable qu’à travers certaines de ses chansons, il cherche à maintenir son souvenir d’une certaine manière (“I will follow”, “Mofo” et “Iris (Hold me close)” font toutes 3 références implicitement ou explicitement à sa mère). Par contre, il raconte souvent les origines du groupe et comment un copain de l’époque l’a convaincu et emmener en moto à la fameuse réunion chez le batteur. Elle était bien là cette chose dont il n’avait pas connaissance (conscience ?).

Mon propos n’est pas de plaindre Bono, sa vie aujourd’hui est certainement bien plus confortable que la plupart d’entre nous. Le sujet de cet article est au-delà de la résilience car il faut du temps pour y parvenir. Le sujet est comment celle-ci peut apparaitre dans notre vie grâce à un moment improbable. Il s’agit des choix que nous faisons consciemment ou inconsciemment pour affronter les épreuves. Toutes les options (la violence et la rébellion en sont une), toutes les possibilités s’offrent potentiellement à nous. Chacun choisit alors d’appliquer telle solution ou telle autre pour surmonter la difficulté, quelle que soit sa nature.

Dans chaque moment difficile, il y a une partie qui peut nous sauver et parfois nous la laissons de côté. Nous avons la possibilité non pas de réécrire notre histoire mais de chercher en nous quelle partie peut nous être utile pour surmonter ce moment. Le Rock’n Roll a sauvé Bono. Et vous, qu’est ce qui vous a sauvé ou qu’est ce qui pourrait vous aider ?

PS pour les fans : la photo est libre de droit, il s’agit d’une photo prise par mes soins le soir du 6 décembre 2015 à l’AccorHotel Arena